Les meubles Lorrain
Atelier Bence
9, rue Lejemptel
94300 Vincennes
Portable : + 33 (0)6 60 17 30 71
E-mail : atelierbence@gmail.com
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Peu usité en Lorraine de l'est et dans les Vosges, le buffet est plus répandu à l'ouest dans la Meuse. Placé dans la chambre de derrière, ce meuble utilitaire ne reflète pas, comme le dressoir, le luxe de la maison. Il est peu orné et le souci de finition se réfugie dans les garnitures. Inspiré du style Louis XV, ce meuble parfois étendu peut comporter quatre portes dans chaeun des deux corps. Ceux-ci reposent directement l'un sur l'autre avec ou sans retrait, ou présentent un intervalle pour ranger la vaisselle. Dans la Meuse, plus près de la Champagne, ce type de buffet à retrait fait, à partir du XVIII ème siècle, l'objet d'une mode. Trois tiroirs flanqués de deux volets latéraux occupent le rangement de la partie basse. Riche et volumineuse vers Commercy, la façade s'anime de marguerites et d'épis de blé, alors que vers Saint-Mihiel des fleurs sans relief restituent au meuble sa sobriété.
LA TABLE
La table de chêne à tiroir obéit à un type unique de construction et s'en tient jusqu'au XIX ème siècle à l'influence du style Louis XIII. Le long plateau étroit repose sur un piètement à traverses en H.
LES SIÈGES
Tout comme la table, le siège de bois obéit à un seul type de construction et le piètement tourné reçoit l'unique note de façonnage. Répondant à l'utilisation spéciale qu'en faisaient les vieux parents, les sièges paillés diffèrent de construction.Il fallait pour les dos chenus un soutien mieux adapté. D'assise plus basse, leur dossier cintré plus élevé s'incurve légèrement pour épouser la forme du dos et se consolide d'une série de bandeaux chantournés. De curieux accoudoirs évoquent la mollesse du bras au repos.
LES HORLOGES
Il existe en Lorraine une grande variété d'horloges. Toutes, à l'encontre des autres meubles, sont coiffées d'une eorniche cintrée. Leurs mécanismes et cadrans proviennent de Hollande pour la Moselle, de Suisse et de Comté pour les Vosges. De la Moselle aux confins de la Sarre, l'horloge se distingue par la qualité dudécor. D'ingénues plantes champêtres se déroulent autour du volet central. Le boitier droit pose sur une base importante qui tend à s'alourdir dans la zone proche de l'Allemagne. A Metz, l'ornementation se fait plus sobre au profit de la ligne générale. Un boîtier cintré au centre et à la base met en valeur le haut du meuble. Moins élégante dans la Meuse l'horloge, reste cependant soignée. Base et sommet de largeur exagérée contrastent avec l'étroitesse du corps central. Le boîtier violonné de l'horloge vosgienne se trouve souvent agrémenté de marqueteries. Sa forme arrondie, son piètement un peu surélevé lui confèrent une allure souple.
Horloge marquetée à édicule galbée
LE COFFRE
D'origine lointaine et populaire, le coffre est taillé pour les déplacements fréquents et subits. Longtemps orné selon les principes du style gothique, il s'allège au début du XVIII ème siècle grâce au pied-de-biche et au chantournement de la traverse inférieure. Un motif sculpté se développe généralement entre les deux panneaux de façade. Plus rares aujourd'hui sont ces coffres à vêtements, hauts, ventrus et peints de couleurs vives, que l'on fabrïcait dans la Sarre, ou ces coffres dont le rangement se complète de deux tiroirs, et que l'on façonnait dans la région de Briey.
LE PÉTRIN
Peu exposé aux regard le pétrin est rarement orné. La caisse à pétrir en forme d'auge ou tonnelée est généralement lisse. La seule fantaisie se réfugie dans un piètement rappelant celui des tables.
L'ARMOIRE
Symbole féminin, l'armoire est l'objet de soins particuliers. La base se trouve pourvue de profonds tiroirs à longues poignées. Les ferronneries comptent peu mais sont remarquables pour la finesse du ciselage qui fait jouer le bois sous son relief de dentelle. Marquetés ou sculptés, les motifs floraux ornent les traverses horizontales et de larges moulures cernent les panneaux de portes. Dans les Vosges, ces moulures se font plus profondes. Vers Metz, où le meuble brille toujours davantage par sa ligne et par son décor, les vantaux cintrés sont souvent sculptés de motifs quadrilobés. Vers Dieuze, les incrustations s'accompagnent de coulées d'étain mais ces pièces sont rares.
LE LIT
Le lit de campagne est en Moselle un meuble indépendant. Les colonnes tournées ponctuant les quatre angles ont vite été remplacées par de simples pommeaux. Dès lors le lit revêt son aspect le plus connu : c'est un meuble étroit, peu étendu, dont le châlit très découpé reçoit une marqueterie à fleurs et arabesques étirées. Dans les régions froides, il prend la forme d'un lit mi-clos ou bien vers la Woëvre et l'Argonne fait partie intégrante de la muraille. Le berceau de type moïse constitué d'une infinité de fuseaux repose sur un piètement élevé ou sur patins-balancelles.
LE SALOIR
S'il existe quelques modèles déeorés, le saloir est le plus souvent de facture simple et prend l'aspect d'un petit coffre sur pieds.
LE PORTE-ESSUIE
Destiné à enrouler l'essuie-mains et à ranger les verres sur l'étagère qui le surmonte, le porte-essuie d'origine champenoise est surtout répandu dans la Meuse. C'est un petit meuble rectangulaire que l'on applique au mur et qui supporte un rouleau de bois.
ACCORDÉ AUX MAISONS D'AUJOURD'HUI
Cette découverte des principaux meubles paysans de Lorraine nous montre combien leurs caractères sont nuancés. Si le mobilier de la région nancéienne est particulièrement recherché pour son élégance et la distinction de son décor, il est certain que le caractère prononcé du meuble messin en fait le meuble spécifiquement lorrain. C'est dans la Meuse, au fur et à mesure que l'on approche de la Champagne, qu'il offre le moins d'originalité. Ici l'on ne retrouve pas la typique association sculpture-marqueterie. Vers la Sarre, l'on pressent l'Allemagne : en effet la ligne générale du meuble s'alourdit tout comme l'ornementation qui devient plus rigide. Le mobilier vosgien présente surtout de l'intérêt en tant que reflet des conceptions artistiques de l'homme isolé. D'archaïques formules puissamment enracinées se retrouvent sur une infinité d'objets usuels, sous forme de signes destinés à conjurer les sortilèges ou à s'assurer les faveurs célestes. Aujourd'hui ees meubles soumis aux fluctuations des ventes ont quitté les maisons paysannes pour l'habitation bourgeoise et par là même changé d'usage. Pour insérer ce type de mobilier dans la demeure actuelle une optique élargie est nécessaire, puisque détourné du mode de vie et de l'emploi pour lequel il fut conçu il a perdu une part de sa fonction originelle qui lui conférait son charme et son originalité propres.
Certes les fidèles reconstitutions possèdent une valeur réelle on tant que documentation folklorique. Mais l'existence est ennemie du statique et il faut garder à l'esprit toutes les différences qui nous séparent d'un temps révolu : besoins, fonctions, conceptions de l'habitat actuel n'ont plus rien de commun avec l'ancienne maison paysanne. Tout comme il le fut autrefois avec raison, le logis est pensé pour la vie présente, pour une vie évolutive. Aussi admettons-nous aisément le sacrifice d'une reconstitution figée pour être trop fidèle, au profit d'une adaptation en rapport avec la vie, le confort, le fonctionnel, de ces précieux «transplantés» d'un autre âge que sont nos meubles régionaux. Réussir cette heureuse conciliation présente bien des difficultés, mais le compromis qui permet aujourd'hui l'alliance de matériaux nouveaux et des meubles anciens laisse à la fantaisie créatrice de nos contemporains le soin de redonner à ces pièces survivantes, le grand souffle d'animation qu'elles méritaient.